Le 18 juin 1944

4th Fighter Group

"The Eagles"

4 FG

71 ST
121 st
133 st
334th Fighter Squadron

Codé QP

335th Fighter Squadron

Codé WD

336th Fighter Squadron

Codé VF

Lt. James H. Glynn Jr. (EVD).

GO

Lt. Robert W. Little. (POW).

GO

2Lt. Harvie J Arnold. (KIA).

GO

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Le 18 juin 1944

Baguer Morvan

"Besnouis"

P-51B-10NA - #43-7187

Codé WD-B

4th FG / 335th FS

LT. MALCOM COX

18 JUIN - 4 AOÛT 1944

Rapport de mission réalisé par le 2nd Lt. Orval C. Miles.

Le 18 juin 1944, lors d'une mission Fighter Sweep dans la région de Combourg, je volais comme vol "Caboose", green two, (vert/deux) et le lieutenant Glynn volait comme "Caboose", vert trois.

Peu de temps après volé en rase mottes en attaquant un convoi routier, l'avion du lieutenant Glynn a été touché par un tir ennemi venant du sol et son avion a commencé à répandre du glycol. Il a continué à voler pendant deux ou trois minutes, puis il a appelé par la radio et il a dit qu'il allait sauter en parachute. J'ai vu clairement l'avion puis son parachute bien ouvert. Cette action a eu lieu juste au nord de Combourg à environ 21 heures 30.

pierre olgaOlga et Pierre REZE (Photo P. REZE)

Ce beau dimanche de juin 1944, il est 18 heures.

Deux jeunes fiancés, Pierre Rézé, professeur au pensionnat St-Magloire et Olga Lainé, regagnent à pied Dol après une journée que nous avions passé, Olga et moi, sur la butte du Tuly, près de la Ville Joie au Tronchet. C'est là que ses parents avaient "évacué" comme on disait à l'époque. En effet, depuis le début du mois, les bombardements et mitraillages de la gare de Dol étaient fréquents et si imprécis, que beaucoup de dolois avaient préféré s'installer à campagne. En fin d'après-midi, nous reprenons la route de Dol à pied comme à l'aller. Pas question de circuler à bicyclette d'abord parce que nos pneus, sont en très mauvais état et qu'il est très difficile de s'en procurer,et parce que les soldats allemands "piquent" les vélos. Ils sentent que la fin est proche et il sera plus facile pour eux de se sauver à vélo qu'à pied. Les polonais ont déjà utilisé ce stratagème, quatre plus tôt ...

Nous pressons le pas afin d'être à Dol avant l'heure du couvre-feu à 21 h.(heure allemande!. Arrivés près de l'étang du Pommelet, nous sommes survolés par une escadrille de chasseurs-bombardiers américains (je sus quelques jours plus tard que c'étaient des Mustang, instinctivement, nous nous jetons dans le fossé. De retour de mission sans doute ces avions se dirigent vers la côte. Encore un vrombissement, mais cette fois avec des ratés. Un avion passe alors au-dessus de nos têtes en lâchant un filet de fumée noirâtre. Il a été touché par la D.C.A. probablement. Il perd progressivement de l'altitude. Nous apercevons deux petits points noirs? qui se détache de l'appareil et tout de suite après deux parachutes s'ouvrent. L'appareil accomplit deux ou trois tours sur lui même puis s'abat dans les champs à quelques centaines de mètres de nous.

Aussitôt des explosions se font entendre et un grand panache de fumée noire s'élève dans le ciel. Mus par notre curiosité, puis nous mettons à courir en direction du point de chute de l'avion. Pendant notre course nous suivons des yeux la descente des parachutes. L'un est tout blanc et l'autre, de couleur orangé, il descend beaucoup plus vite. C'est peut être le parachute du siège éjectable ?.

Nous avions mal évalué la distance à parcourir et nous mettons pas mal de temps à arriver sur les lieux de "l'accident". Les allemands qui sont venus en camion sont déjà là. Il s'agit pour eux de capturer le pilote au plus vite afin d'empêcher la population de le camoufler car dans ce cas il serait réutilisé contre eux un jour ou l'autre. La guerre n'étant pas finie...

Nous buttons sur un groupe de curieux, des femmes et des enfants surtout, contenus à grand peine par des soldats allemands mitraillettes à la main. Impossible d'apercevoir les débris fumants de l'avion. Les allemands crient des "raus! raus!" et nous font reculer. Et le ou les pilotes dans tout cela? Je demande à l'une des femmes présentés si elle a vu atterrir un parachutiste. "Dame oui ! me dit-elle. Il est tombé par là! ".

La direction qu'elle m'indique fait un angle droit avec celle du point de chute de 1'avion. Pour l'instant, il n'y a pas d'allemands dans la zone indiquée. Il faut aller voir ! A peine ai-je parcouru quelques dizaines de mètres que j'aperçois une ombre fugitive, le long d'une haie, à cent mètres à peine. C'est sûrement le pilote ! Je reviens chercher Olga et nous nous dirigeons vers cette haie. Les allemands crient de plus en plus fort. Depuis le débarquement en Normandie, ils sont de plus en plus hargneux et il ne fait bon les provoquer. Jamais la chasse aux réfractaires et maquisards et autres "terroristes" comme ils disent, n'a été aussi féroce. Personnellement, n'étant pas en règle avec le S.T.O., je ne tiens à tomber dans leur pattes.

Nous voici près de la haie ... Pas de parachute ni d'aviateur ! J'ai dû avoir une vision tout à l'heure ! Sur le point de repartir, nous entendons "Hello! Hello !" tout près de nous. Nous ne voyons toujours rien. C'est alors que les ronces recouvrant le fossé s'écartent et qu'une tête ronde casquée apparaît. C'est lui ! Pas question de s'approcher car les sentinelles allemandes que nous venons de quitter nous aperçoivent. Il s'agit de ne pas attirer leur attention! alors, je prends Olga par la taille et dans cette pose romantique je m'adresse au pilote en anglais bien entendu !

Ma première question est de lui demander s'il est américain. Sa réponse affirmative me remplit de joie et d'émotion ! Pensez donc ! Rencontrer son premier américain dans un tel lieu et dans de telles circonstances ! C'est merveilleux, non ? Seulement voilà, les boches ratissent le secteur et ils finiront bien par le trouver. Heureusement, il semble qu'ils n'aient pas de chiens policiers ! Bon ! La première chose à faire, c'est d'aller lui cherche des vêtements civils. Je lui dis ce que nous allons faire et lui demande de se faire le plus petit possible dans sa cachette, au fond d'un épais roncier recouvrant le fossé ...

Nous sommes complètement désorientés. Ah! une ferme à quelques centaines de mètres. En route nous nous tenons toujours par la taille tant que nous sommes visibles par les allemands. Et nous revoilà sur la route de Dol au Tronchet que nous avions quittée une demi-heure plus tôt. Là encore, un attroupement. Je demande le propriétaire de la ferme. "Vous l'avez trouvé ?" me demande une femme. C'est justement la propriétaire. Je suis bien forcé de lui dire que nous avons effectivement trouvé "l'américain" et qu'il nous faut des vêtements tout de suite.

"J'vas vous donner un bleu au patron !" Nous fourrons dans le cabas d'Olga un pantalon et un bleu de travail. Pendant ce temps, des allemands sont arrivés et questionnent les curieux. Pour les éviter, nous sommes obligés de faire tout un détour et nous mettrons plus d'un quart d'heure pour arriver au but, jouant à cache-cache avec eux.

Alerte ! deux soldats marchent le long du fossé et s'approchent de la cachette. Heureusement, ils ne remarquent rien et continuent leurs recherches. J'imagine que le coeur de notre américain a dû battre la chamade ! L'alerte passée, Olga lui donne le paquet de vêtements pendant que je fais le guet. Elle lui conseille de ne pas bouger de là. Nous viendrons le chercher quand la nuit sera tombée ou avant, dans le cas improbable où les allemands quittent les lieux avant la nuit….

Quant à nous, nous revenons près de la ferme sur la route de Dol. Pas de chance ! Une auto amphibie allemande s'arrête près de nous. Deux officiers en descendent et l'un d'eux nous interpelle. Pas question de s'esquiver.

Tout de suite cette question : "Vous avoir vu avion tomber? -oui- et pilote aussi ? - oui - Dans quelle direction ? par là - (nous croyons bien faire en indiquant une fausse direction) -Vous mentir ! Moi avoir vu tomber par là ! Pourquoi vous mentir ? Montrez papiers ". Il nous fallut expliquer notre présence en ces lieux et puisque nos "aussweis" (laissez-passer) précisaient que nous résidions à Dol, nous fûmes instamment priés de regagner notre port d'attache le plus vite possible. D'ailleurs, à l'heure du couvre-feu approchait. Nous nous en tirions à bon compte, surtout moi qui suis en situation irrégulière. C'est très bien de partir pour Dol, mais que va devenir notre américain ?

Pas question de l'abandonner ! Il faut trouver une solution. Nous n'avons pas le choix ! Parmi les badauds se trouvait un dolois, père de famille nombreuse et demeurant dons la rue Ceinte, juste à coté de la villa où j'avais ma chambre. Nous le retrouvons et lui demandons s'il peut s'acquitter de la mission que nous ne pouvons plus remplir. Bien sûr qu'il peut ! Il est justement venu passer le dimanche avec des copains tout près d'ici et ne repartira à Dol que le lendemain. Et puis c'est quelqu'un qui n'a pas froid aux yeux. Je ne me doutais pas que ce que je lui demandais serait la cause de sa mort quelques jours plus tard !

Nous lui indiquons où se trouve la cachette de l'aviateur et nous reprenons la route de Dol. Nous n'avons oublié qu'une chose et d'importance, c'est de lui demander où il conduirait 1'aviateur, dans le cas, bien sûr ; où sa mission réussisse ! Jamais le chemin de Bénouis à Dol ne nous parut aussi court. Bien que fatigué, je ne dormis guère cette nuit-là ! Où allons-nous cacher le pilote si toutefois nous le retrouvons ? Et au fait, pourquoi pas dans cette grande villa qui m'abrite et lui n'est occupée qui par son propriétaire, un vieux prêtre retiré du ministère et moi. Qui pourra deviner qu'un américain se cache dans la demeure d'un cieux curé ? Oui, c'est la solution idéale! Je la soumettrai à mon hôte dés que j'aurais "récupéré" l'aviateur ...

Dès le couvre-feu levé, je passe prendre Olga, rue des Ponts et en route pour Bénouis ! Il pleut, ce qui retarde notre marche. De plus, nous sommes mal chaussés (les bonnes chaussures ne courent pas les rues!). Nous allons tout droit à la cachette. Ouf ! elle est vide ! Pourvu que tout se soit bien passé ! Près des restes de l'avion il y a encore deux sentinelles allemandes. Sans doute craignent-ils que les appareils qui n'ont pas brûlé soient dérobés ? La pluie tombe à torrents et nous sommes trempés comme des soupes ! Il s'agit maintenant de mettre la main sur notre dolois et par suite de l'américain ! Alors, nous faisons du porte à porte en partant du café de Bénouis. Mais les paysans sont méfiants d'autant plus qu'ils ne nous connaissent pas et pas les temps qui courent il n'est pas prudent de raconter sa vie à tout le monde ! Enfin, après deux heures de recherches de ferme en ferme, nous découvrons notre "pigeon voyageur" chez des braves gens, au Bois Quinou. Tout heureux de nous revoir, il nous saute au cou. Il va enfin pouvoir communiquer ! Il nous fait le récit de sa nuit. L'enlèvement de la cachette s'est très bien passé malgré la présence des boches. Par contre, on ne peut pas en dire autant des conditions de son premier hébergement sur le sol français ! Notre "déménageur" l'a emmené dans la grange où sont réfugiés ses copains. Elle n'a rien d'un hôtel "quatre étoiles" ! Des outils partout,des tonneaux de cidre,de la paille étalée en guise de lits ...

On fait la cuisine dehors ! A la guerre comme à la guerre ! Notre protégé (nous savons maintenant qu'il s'appelle James Glynn et qu'il est originaire de Los Angeles, il a couché dans paille pour la première fois de sa vie certainement. Et il n'a pas bien digéré son premier repas français : de la saucisse grillée (bien grasse) arrosée d'un cidre sec comme un coup de trique ! Les hôtes ont, de plus, une drôle, de dégaine. Il y a même parmi eux un F.T.P. d'un maquis voisin armé d'une pétoire ! Heureusement que des voisins. qui se sont rendus compte de sa détresse ils ont pu l'emmener chez eux au petit matin et lui donner un copieux petit déjeuner !...

Il faut absolument l'enlever de là d'autant qu'il y 'a encore des allemands dans le secteur et que dans quelques heures, tous les villages environnants seront au courant de sa présence. Nous prenons la décision de retourner à Dol. Nous reviendrons chercher Jimmy dès que nous aurons trouvé une "planque" sûre. Tout le long du chemin nous envisageons plusieurs solutions mais revenons toujours à celle qui a ma préférence : le camoufler dans la villa où j'ai ma chambre. Nous fonçons donc vers la rue Ceinte racontons notre odyssée à notre bon vieux curé qui n'en croit pas ses oreilles et, pour finir, nous lui exposons naïvement notre "solution". Alors là, notre auditeur ne sourit plus ! "Ici ? Pensez-vous ! y a trop d'allemands dans le coin, la caserne, kommandantur... Il ne serait pas en sécurité ! "... C'est un refrain que nous allons entendre trois fois en deux jours ! " Je connais un patriote qui se fera une joie de l'héberger. Je vais de ce pas le contacter et reviens dans quelques minutes !

"Au retour, 1'abbé a le sourire. L'ami "patriote" à consenti à recevoir Jimmy et nous devons le lui "remettre" à 20 h 30, la solution que j'avais envisagée ce qui me déçoit un peu mais nous n'avons pas le choix ! Nous reprenons la route du Bois Quinou. La pluie n'a cessé de tomber ... Hélas ! Jimmy n'est plus là où nous l'avions laissé ! Ses premiers "sauveteurs" l'ont remmené dans leur grange. Jimmy a de nouveau l'air catastrophé ! C'est alors que commence la partie la dure de notre "mission" : arracher Jimmy des griffes de ses "protecteurs", courageux certes mais aussi imprudents et sans projet précis. Il nous a fallu parlementer une bonne demi-heure pour arriver à les persuader que notre solution offrait pour Jimmy les meilleures garanties de sécurité... Enfin, ça y est....

Nous voici tous les trois en route pour Dol. Nous avançons prudemment, prêts à foncer derrière une haie si un véhicule ou une patrouille allemandes apparaissent. Avant de partir, nous avons fait la leçon à Jim. Malheureusement, il n'a aucun papier d'identité. Alors, pas question de se fourrer dans les pattes des boches ! Ils auraient vite fait de l'identifier sans avoir besoin de lui demander ses papiers. Il sent l'anglo-américain à plein nez ! avec son tabac blond ! Avec son béret basque et son bleu de travail, on sent le déguisement !

Nous l'avons délesté de sa minuscule boussole à peine plus grande que l'ongle du petit doigt et de ses cartes imprimées sur des carrés de tissu format pochettes. Par contre, nous lui avons laissé quelques faux billets français. Quant au reste de son équipement, il est entre les mains de ses premier sauveteurs ...

 

GLYNN

(Photo coll P. REZE)

 

Alerte ! A l'entrée du bourg de Baguer-Morvan nous entendons des coups de feu. Ce sont des allemands qui s'entraînent. Il faut éviter le village en coupant à travers champs. J'ai passé mon imperméable à Jim et je suis trempé jusqu'aux os. Nous parvenons à la voie de chemin de fer de Rennes à Dol que nous suivons jusqu'à sa jonction avec celle de Dinan. Nous retombons sur la route de Bonnemain et entrons à Dol par l'abbaye. Comme nous avons un bonne demi-heure d'avance sur l'heure du rendez-vous, nous faisons une court halte rue des Ponts chez Olga. Son père est là et va chercher dans sa cave une bonne bouteille. Mais le gros du travail reste à faire : se rendre de la rue des Ponts jusqu'au Boulevard Planson où Jim est attendu, du moins, je l'espère ! Plus question de se cacher derrière une haie si nous rencontrons des boches ! Quelle va être la réaction de Jim quand il va voir de près son premier ennemi ? Finalement tout se passe bien. Des allemands, nous en rencontrons plus que prévu mais Jim ne bronche pas. Nous sommes accueillis par le percepteur et sa femme assistés d'un docteur voisin accompagné lui aussi de sa femme. La table est mise et il semble que l'on doive festoyer. Mais je ne suis pas invité au repas.

Il est vrai que l'heure du couvre-feu est proche et il faut que je me hâte pour regagner ma chambre. Avant que je parte, on m'a délicatement prévenu qu'il faut que je revienne demain matin reprendre Jim pour le conduire dans une propriété à la sortie de Dol où il sera plus en sécurité. Et de deux ! Comme convenu, le lendemain matin, à 6 h 30, je me retrouvais avec, Jim sur la route de sa nouvelle planque. Pour parvenir à cette dernière situé à la sortie de Dol sur la route de Rennes, il faut monter le boulevard Planson passer sur le pont de la "flemme" et devant le cimetière. Le trajet n'est pas très long mais il y a ou milieu du boulevard une sentinelle montant la garde devant une villa réquisitionnée qui sert de "lazaret"(infirmerie).Tout se passe bien et nous arrivons sans encombre à bon port. La propriété de Haute-Folie est spacieuse, à l'écart de la ville et des centres allemands. Je passe la matinée avec Jim car le propriétaire n'arrivera qu'à midi. Ce dernier parle parfaitement l'anglais (et l'allemand). Formidable ! On ne pouvait souhaité ( meilleur refuge pour Jim. Hélas !

Vers 16 h, on me demande, rue Ceinte où je suis à me reposer. C'est un émissaire envoyé par un industriel de Plerguer avec qui je suis en relations (non, commerciales) et qui, ayant appris par la rumeur publique notre "sauvetage", nous propose de lui amener notre aviateur. Un fermier des environs de Ville-des-Bidons accepte de le cacher. Sa ferme est assez retirée et il est difficile de trouver meilleur cachette pour Jim. Je me rends immédiatement à Haute-Folie. Le propriétaire est enchanté de cette proposition car il ne tenait pas à garder Jim plus longtemps. Nous fixons l'itinéraire pour nous rendre à la ferme de Bel-Hêtre ; en évitant surtout la route de Dinan nous passerons par Carfantin puis devant l'abbaye, prendrons le chemin de Montplaisir et au besoin à travers pour gagner Roz-Landrieux et couper enfin la route de Dinan au passage à niveau de Servain où nous attendra le neveu de notre industriel. Nous reprenons nos bâtons de pèlerins et en route encore une fois !

Hélas ! mes souliers, déformés par la pluie me font mal et j'ai du mal à marcher. Il faut absolument que j'aille en changer. Pas question d'y aller tous à la fois. Je laisse Olga avec Jim à l'entrée de la "Rousse". Ils s'en iront le plus doucement possible vers Carfantin où je les rejoindrai en passant par Légeard. Pendant mon absence, ils furent assaillis par un groupe de soldats allemands plus sentimentaux que belliqueux et qui firent des propositions à Olga du genre "promenade Mademoiselle ?". Elle ne put les décourager qu'en prenant Jim pardessus le bras et en accélérant le pas. Du coup, je les rattrapais plus loin que prévu non sans m'être inquiété passablement. La route fut longue de Dol à Plerguer. Nous n'étions pas remis de nos fatigues de la veille et puis Jim, peu habitué à la marche n'avançait pas. Enfin nous arrivons à bon port une fois encore. Mais nous somme las, épuisés un bon rhume et Olga a les pieds en sang. Nous passons la nuit à Plerguer chez une tante d'Olga. Nous retournerons à Dol demain matin...

Le lendemain soir j'avais rejoint le collège replié à Trans, à pied bien sûr, non sans avoir donné rendez-vous à Olga pour le dimanche suivant à Landal. Elle m'y donnera des nouvelles de Jim et même un petit mot qu'il m'avait écrit. Quand le collège fermera définitivement ses portes, fin juin, nous nous rendrons souvent à Bel-Hêtre tenir compagnie à Jim et essayer de calmer son impatience de reprendre le combat. Lorsque les éléments de 1'armée Patton traversèrent la région, il partit avec eux et nous n'eûmes plus jamais de ses nouvelles.

 

NOTE GLYNN

Dessins, courriers de James, remis à son ami Pierre pendant son séjour dans la région de Dol.

(Photo coll P. REZE)

 

Le samedi suivant l'atterrissage forcé de Jim, Olga descendait la grande rue de Dol où les forains ne se battaient pas pour avoir une place sur le pavé, un enseignant du collège technique s'avance vers elle et lui dit en montrant le paysan qui l'accompagnait "voilà quelqu'un qui veut vous parler" l'homme s'approche alors d'elle et lui murmure à l'oreille :" je n'ai un autre et c'est ainsi que nous fîmes 1a connaissance de Malcom Cox de l'Ontario au Canada. Abattu au nord de Rennes il marcha toute la nuit à travers champs et vint échouer au petit matin dans une grange près de Roz-Landrieux où le paysan le découvrit, dormant comme un bienheureux dans la paille. Comme il mesurait près de deux mètres, il fut très difficile de trouver des vêtements à sa taille. N'ayant pas trouvé de chaussures à son pied nous fumes obligés de couper le bout de ses bottes en caoutchouc pour le chausser. Camouflé dans la ferme de la "ville-Goriou" il partit lui-aussi avec les premières troupes alliées de passage. Si nous traversâmes indemnes toute cette période mouvementée, il n'en fut pas de même du dolois qui avait pris le risque de sortir Jim de sa cachette. Lui et ses camarades s'étaient partagés l'équipement de Jim. Il se trouvait en tournée de ravitaillement dans la région d'Avranches quand les Américains firent leur percée. Le blouson d'aviateur américain de Jim sur le dos, il fut pris pour un ennemi par les Allemands et abattu, laissant dans le besoin une veuve et une ribambelle de gosses.

 

COX GLYNN

James Glynn et Malcom Cox

 

Ceux qui s'en tirèrent à bon compte par contre fut les jeunes gens qui découvrirent le parachute de Jim et voulurent l'emporter chez eux. Malheureusement, ils furent arrêtes par les allemands, emmenés au château de Beaufort où ils furent gardés quelques jours et relâchés.

L'armée américaine entreprit des enquêtes pour rechercher les personnes ayant assisté ou secouru les aviateurs alliés abattus en France pendant l'occupation allemande. Nous remplîmes plusieurs questionnaires en 1946. Et nous reçûmes un diplôme signé du général Eisenhower, exprimant la reconnaissance du gouvernement américain pour les services qui nous avions rendus, diplômes que nous avons précieusement dans nos archives.

 

diplome