Vendredi 25 août 1944

Coëtmieux

Le pré des "Passoués"

 

P-47D-28-RA. #42-28439

Codé IA-K

358th FG / 366th FS

2nd Lt. James E Morris

 

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COËTMIEUX, Côtes Du Nord. Région de LAMBALLE. Vendredi 25 août 1944. (18 heures 55-US).

 

Crash de l'avion de chasse Américain Thunderbolt P-47D- 28RA. Immatriculé : 42-28439. Piloté par le 2nd Lieutenant James E. MORRIS. Jr. Matricule : 0-815745. Appartenant à l'escadrille 366th du 358th Figther Groupe de combat aérien 9th US AIR FORCE surnommé ''The Orange Tails''.

 

Tôt le matin,sur l'aérodrome A.28 Boucey Pontorson dans la Manche, l'escadron de combat 366th se prépare aux 3 missions prévue pour la journée. Mission 212-213-214. Le terrain d'aviation, ALG 28 (Advence Landing Ground) est une nouvelle unité de support aérien créée en quelques jours par le 819th Bataillon du génie de l'air américain au lieu dit ''La Plaine'' en Boucey. Il sera opérationnel le dimanche 15 août 1944, ou en cours d’après midi se poseront plusieurs dizaines de chasseurs P-47 venant des aérodromes du nord de la Normandie dont l'aérodrome A.14 Créteville. De cette piste de 1525 mètres, une des plus longue du territoire libéré, la 9th US Airforce entra en action pour soutenir l'avance alliée engagée dans la libération de la Bretagne et du grand ouest. Les objectifs majeurs étant, Brest, Lorient, Saint-Nazaire, la Rochelle et les bases des sous marins U-Boat de la Kriegsmarine auxquels il fallait porter un coup fatal.

 

En ce 25 août 1944, 3 missions étaient donc prévues. La première (la n° 212) avait pour objectif, l'attaque de cibles ennemies à l'opportunité sur la région de Poitiers, Châteauroux, Le Blanc (convois routiers, ferroviaires, véhicules isolés, troupes ...). Le Capitaine Schuster fut le leader de la première opération décollant à 8 heures 15. Il prit le commandement des 11 lieutenants pilotes sur P-47, l'ensemble divisé en 3 groupes de 4 avions, les chasseurs pour cette sortie n'étant pas porteurs de bombes. Le P-47 était armé de 8 mitrailleuses d'ailes (2 x 4) calibre 50 (12,7 mm). Le pilote, disposait d'une redoutable puissance de feu. Tous rentrèrent sans problème à la base aux environs de 10 heures 15 après avoir atteint plusieurs objectifs ennemis dont un camion citerne allemand qui s'embrasa immédiatement ainsi qu'un véhicule de commandement qui fut détruit avec tous ses occupants, 2 locomotives furent touchées. La seconde opération (la n° 213) fut le bombardement des navires de la kriegsmarine dans le port de Brest. Finistère, mais aussi d'unités navales ennemies repérées dans la rade près de Crozon. Après un décollage à 12 heures 40, l'escadrille put déclencher l'attaque à 13 heures 20. L'ensemble du bombardement dura environ une heure, touchant plusieurs objectifs. Le retour à la base fut effectif à 15 heures 30.16 P-47 Thunderbolt prirent part à cette mission dirigée par le Capitaine Farlow. 32 bombes de 250 kilos furent larguées, endommageant sérieusement les bateaux ennemis. Les tirs de Flak (défense allemande contre avions) furent particulièrement intenses, la côte étant bien défendue. Aucun avion ne fut touché.

 

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Photo collection Footnote 

 

 

Le Capitaine Kimball commanda la mission, la n° 214, la troisième de cette journée du 25 août 1944. L'objectif fut le même que l'opération précédente, il fallait terminer le bombardement des navires allemands en tachant de les couler. 16 aviateurs participèrent à cette mission. Pour 11 d'entre eux, c'était la deuxième opération de la journée, ils étaient déjà dans la précédente opération. Les lieutenants Hannold, Godfrey, Matye, Brown, Maeherlein participèrent aux trois missions, totalisant chacun 9 heures 40 minutes de vol cette même journée. La dernière mission décolla à 18 heures 39 minutes en direction de l'ouest. Les P-47 se placèrent en formation de vol par 4, définis par couleur, ''white'' pour celle du leader accompagné des lieutenants Brown, Given, et Keever. ''Red'' pour les Lieutenants Kantorsky, Roberson, Smith et Murphy. Puis le groupe ''yellow'', les lieutenants Matye, Gilbert, Morris et Godfrey. Le dernier groupe, ''blue'' était composé des lieutenants Schwellenbach, Hannold, Maeherlein, Manning. C'est au cours de cette dernière mission que le Lieutenant James E. MORRIS Jr. connu de graves problèmes. Un quart d'heure après avoir quitté Pontorson, la formation était en approche de Lamballe. L'escadrille volait à 2500 pieds (760 métres d'altitude environ), la météo était favorable avec un vent nord-nord-ouest soufflant à 55 kms/heure. Un intense plafond nuageux se développait à l'ouest. Peu avant la commune d'Andel, le Lieutenant Morris, entra dans un nuage épais et se trouva perdu dans le brouillard, n'ayant plus aucun point de repaire extérieur. Consultant ses appareils de bord, il décida de prendre de l'altitude immédiatement pour sortir de cette délicate situation. Il connaissait les risques possibles de collision avec un autre avion. Il atteignit rapidement les 3000 pieds (910 mètres), quand au travers d'une trouée, il aperçu le leader et un autre pilote qui venaient vers lui. Il poussa son moteur immédiatement pour éviter ses coéquipiers et sorti rapidement de cette situation dangereuse. Il entreprit aussitôt une réduction de sa vitesse cherchant à stabiliser son P-47 .Cette manœuvre malheureusement entraîna un violent décrochage de l'avion qui parti en vrille. A nouveau il tenta un redressement, sans succès. L'avion se mit à vibrer de partout. Se voyant perdu, le pilote détacha rapidement les sangles qui le fixaient à son siège, il ouvrit la verrière en appuyant sur le contacteur électrique, dans l'espoir d' évacuer son P-47 au plus vite et de sauter en parachute. La verrière ouverte, il enjamba le côté gauche du cockpit. Un vent violent le projeta à l'intérieur. Il se blessa légèrement. La situation devenait critique car le lourd P-47 (4 tonnes 700 + 500 kgs de bombes) tombait rapidement. Il tenta une nouvelle manœuvre en se jetant dans le vide, évitant de peu l’empennage. Après une chute libre d'une centaine de mètres, il tira la poignée d'ouverture de son parachute. Cette action le secoua violemment. Tandis qu'il descendait, il aperçu en dessous de lui, son avion qui avait prit feu en vol, et qui décrivait une grande courbe sur sa gauche. Le lieutenant Morris indiqua dans son rapport ''pendant ma descente, j'ai entendu le choc de mon avion percutant le sol ainsi que l'énorme déflagration des bombes qui explosèrent immédiatement. J'ai vu l'énorme incendie qui se déclara, dégageant une fumée noire qui s'élevait haut dans le ciel. Mon arrivée au sol fut très rude. Je fus contusionné. J'étais KO pendant quelques minutes ''. Très vite, après avoir récupéré, j'entrepris de me relever.

 

Le lieutenant MORRIS avait atterri près d'un chemin creux, en pleine campagne. Il ramassa son parachute et se dirigea vers la ferme de "Belleville" située en haut d'un chemin. L'agriculteur, Monsieur Jégu avait assisté à la scène. Il s'empressa de venir le rejoindre et aider ce pilote tombé du ciel. Lors de leur rencontre, Monsieur Jégu lui précisa que la région était libérée et qu'il ne craignait rien. Arrivés à la ferme, il le fit entrer chez lui. S’apprêtant à lui proposer quelque-chose, une Jeep arriva dans la cour avec 4 GI à l'intérieur. Cette voiture était suivie par une ambulance Dodge. Les militaires américains prirent contact avec le pilote qui après avoir salué rapidement Monsieur Jégu monta dans la voiture. L'arrivée rapide de ces hommes était due au fait qu'ils faisaient parti d'un convoi qui se dirigeait vers Saint Brieuc circulant au même moment sur la nationale 12 toute proche, au lieu dit ''La truite'' situé à 800 mètres du lieu du crash et qui eux aussi avaient assisté à cette scène. Ayant quitté la ferme, le lieutenant Morris voulu voir ce qu'il restait de son P-47. Arrivant sur les lieux, il fit évacuer rapidement les gens qui avaient accouru. Il leur fit comprendre qu'une bombe pouvait encore être restée dans la carcasse toujours en flamme et qu'une nouvelle explosion était possible. Des munitions éclataient sous l'effet de la chaleur. Les gens évacuèrent l'endroit en toute hâte, vu le danger.

Le lieutenant Morris rejoignit Pontorson peu avant minuit. Le lendemain, auprès d'un officier supérieur il dû rédiger un rapport sur les circonstances de sa chute. Il repris le combat rapidement au sein de son escadron. En fin d'année 1944 il prit part activement aux combats dans la bataille des Ardennes et fut crédité d'une victoire le 25 novembre 1944 où il abattit un chasseur allemand. Le lieutenant Morris est décédé en 2006 aux USA.

 

Russell Lobdell à l'extrême gauche, à droite, James E. Morris, William Wetherill, Henry Murphy, puis Charles H. Kern. Charles H. Maehrlein est à genoux à l'extrême droite.

Peter J. Donlon est le premier à droite au premier rang, suivi de Craig C. McCall, Doyle et David Nee Loveless. 

Photo du site internet

 

 

 Remerciements à Monsieur Yvan Bourdel, Monsieur Jégu, Monsieur Hervé pour l'aide apportée à nos recherches. Merci à Monsieur Jimmy Tual pour sa recherche aux AD 22, (AFMD 22 - Amis de la fondation pour la mémoire de la déportation en Côtes d'Armor) ce qui a permis de faire aboutir la vérité sur ce crash non élucidé depuis plusieurs années. Jean Michel Martin - Daniel Dahiot- Le 20 Juillet 2014.

Enquête à Coëtmieux du 30 août 2010

Août 1944

Crash d'un P-47, avion et pilote inconnus

 

 

Coëtmieux. Côtes d’Armor.

Témoignage de Monsieur Hervé, agriculteur en retraite. Chute d’un avion P-47 américain. Début août 1944. Pilote et mission inconnus.

J’avais 15 ans et je travaillais à biner des choux en compagnie de mon père dans un de nos champs. Je ne sais plus la date de cet événement, mais ce dont je suis sûr, c’est que notre région venait d’être libérée. Je pense à la première quinzaine d’août 1944. Il était environ 11 heures. C’était une belle matinée ensoleillée. Soudain, nous avons entendu des avions qui venaient du nord de Lamballe. Ils étaient six ; nous les suivions du regard, ils étaient bien avant le bourg d’Andel et volaient à une altitude moyenne. Ils brillaient dans le ciel. En arrivant peu avant ce bourg, nous en avons vu un se mettre à fumer et se détacher du groupe immédiatement. Il faisait une énorme traînée noire derrière lui. Après avoir décrit une large boucle pour éviter le bourg d’Andel, le pilote s’éjecta de son appareil. Nous avons vu son parachute s’ouvrir. Nous avons eus peur. L’avion est passé au dessus de nous, assez bas, moteur à fond, dans un bruit d’enfer.

 

Le pré des "Passoués"

Il vint s’écraser dans le pré des "Passoués" dans un vacarme effroyable.

Aussitôt, il prit feu, une de ses bombes ou voir les deux explosèrent immédiatement. De notre champ nous voyions les hautes flammes et l’énorme fumée noire qui s’en dégageait. Des débris retombaient sur le sol. Nous étions à environ 500 mètres, et nous entendions de petites explosions dues certainement aux munitions de petit calibre qu’il avait à bord. Sur la route nationale 12, au lieu dit "Le pont de la Truite" depuis tôt le matin passait un convoi interminable de véhicules américains, qui se dirigeait vers Saint Brieuc. Le pilote en parachute était arrivé dans un chemin creux proche de la ferme de "Belleville".

 

Chemin de Belleville

 

Le cultivateur qui exploitait cette ferme, ayant vu la scène s’empressa de lui porter assistance et l’emmena chez lui. Il n’eût même pas le temps de lui offrir un verre car déjà dans la cour se présentait une Jeep américaine avec à l’intérieur quatre soldats noirs qui le prirent à leur bord et la voiture après un demi tour disparu. Cette Jeep était suivie par un Dodge ambulance qui était venu au cas ou le pilote aurait été blessé, ce qui n’était pas le cas. Le cultivateur fût très frustré de n’avoir pût accueillir ce pilote et surtout de n’avoir jamais su qui il était.

Le pilote une fois monté dans la Jeep qui venait de le récupérer à la ferme de Belleville se rendit dans cette même voiture, se rendre compte du crash de son avion et cria aux gens qui étaient déja sur place de s'éloigner au plus vite car une bombe risquait d'exploser dans l'incendie. Les gens se retirérent rapidement, les Américains partirent aprés quelques minutes à distance, mais il n'y eut pas d'explosion. Peut-être avait elles explosé au cours de la chute au sol.

Les jours suivants cet événement une foule immense se rendit sur place pour voir les restes de l’avion.

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Photos Jean Michel Martin

Merci à Monsieur Hervé pour ce témoignage. Merci également à Monsieur Jégu pour son aimable accueil. Jean Michel Martin. ABSA 39-45. 30 août 2010.