Perte du 26 janvier 1943

Eréac

Wellington BJ714

Codé QB-F

No. 424 Squadron RCAF 'Tiger Squadron'

ÉREAC. Côtes d’Armor.

Mardi 26 janvier 1943. Sur la Base de Topcliffe Yorkshire Angleterre.

L’escadron 424 du groupe de bombardement de la Force Canadienne se prépare a une mission de bombardement. Ils doivent en vol rejoindre une formation qui au total regroupera 157 avions alliés. L’objectif aujourd’hui sera la base sous marine de Lorient ou de gigantesques travaux de construction sont en cours par l’organisation allemande TODT. De cette base partent déjà les redoutables U-BOAT (Sous Marins).

Les bombardiers du 424ème groupe Canadien sont des Vickers Wellington du type 3. Ce sont des bimoteurs pouvant emporter deux tonnes de bombes. Cet avion a pour sa propre défense deux postes de mitrailleuses lourdes, doubles. Un poste dans le nez de l’avion l’autre en bout de fuselage arrière. Les défenses de côtés sont également pourvues de postes de tirs servis par un mitrailleur. Cet avion a une forme générale très allongée, c’est pourquoi les aviateurs lui donnent le nom de cigare volant. Ce Wellington est immatriculé QB-F. Six hommes composent son équipage tous au grade de sergent.

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Pilote, le sergent McHarg Vernon Frédéric

(Tué)

Navigateur, le sergent Riach Allan Cruickshank

(Interné au camp 8B/344/L3)

Opérateur radio/mitrailleur, le sergent Putnam Max Ernest

(Tué)

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Mitrailleur, le Flight sergent Masterman Wallace Alfred

(Tué)

Mitrailleur, le sergent Ken Vallis

(Prisonnier)

Bombardier, le sergent Ingram Graydon Arthur

(Interné au camp 8B/344)

Aux commandes de cet appareil, le sergent McHarg Vernon Frédéric, à ses côtés, le navigateur le sergent Riach Allan Cruickshank, l’opérateur radio, qui est aussi, le premier mitrailleur est le sergent Putnam Max Ernest, le second mitrailleur est le sergent Masterman Wallace Alfred. Le troisième mitrailleur est le sergent Ken Vallis. Le sergent opérateur chargé de larguer les bombes sur l’objectif est le sergent Ingram Graydon Arthur. Tous sont âgés d’une vingtaine d’années. Le groupe a décollé du nord -est de l'Angleterre vers 17 heures 30 et à 18 heures rejoint sa formation. A l’aller le vol se passe sans aucun problème arrivé à la verticale de la base de Lorient, le largage est effectué par Ingram mais une bombe refuse de s’éjecter de la soute suite a une problème technique. (Voir carte du vol ).
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Tout autour de la formation, c’est l’intensité du feu des défenses contre avions ( DCA allemandes) qui illumine le ciel de lueurs rougeâtres accompagnées de volutes de fumées noires. Vision terrifiantes pour ces jeunes aviateurs pas habitués à cette situation. Soudain, un choc énorme, violent secoue l’avion. Il vient d’être touché par plusieurs projectiles. Immédiatement McHarg le pilote se rend compte de la difficulté à piloter son appareil endommagé. Un des moteurs s’est arrêté. Le pilote prévient tout l’équipage de la situation et de sa décision de quitter la formation pour mettre le cap sur la plus proche base Anglaise pour se poser. Il reste une bombe à bord et il va falloir la larguer absolument lorsque l’avion survolera la Manche. A l’évidence le pilote se rend compte qu’il perd de la vitesse et qu’il perd aussi de l’altitude de plus en plus. Dans les hauts parleurs du bord il informe ses coéquipiers des difficultés à venir et indique à chacun de mettre en instance sa propre survie.

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Putnam, McHarg, Ingram, Vallis

 

Un témoin raconte. Il était environ 20 heures. J’habitais sur la place du bourg d’Éreac et soudainement le bruit intense, bas, d’un avion se fit entendre. Je suis sorti de chez moi aussitôt, trouvant cela inhabituel, j’ai pensé tout d’abord à un avion allemand de surveillance car une lumière était restée allumée en face chez un commerçant. Les allemands étaient strictes, il ne fallait aucune lumière visible. Un voisin m’a rejoint immédiatement, et là, nous avons vu cet énorme bombardier, qui très bas passait au dessus de l’église venant de la direction de Mérillac. Il décrivit une courbe et se dirigeât vers L’Est. Il y avait de la lumière à bord et malgré la nuit nous apercevions une traînée importante de fumée noire sortant par l’arrière de l’appareil. L’avion continua sa route quelques instants, et se fut un bruit d’explosion d’une rare violence qui submergea notre bourg, si tranquille d’habitude. Le WELLINGTON s’était écrasé à la sortie du bourg, près des écoles, dans le creux d’un champ sur la route de Merdrignac. Cette déflagration puissante enveloppa le bourg, soufflant les vitres, arrachant les fenêtres et volets et aussi des portes. Même une partie des vitraux de l’église furent soufflés. Le témoin rapporte ces fenêtres qui ouvraient à contre sens après l’explosion. Un gigantesque incendie sur plus de deux hectares se déclara. On voyait comme en plein jour. Le pilote conscient qu’il était au dessus d’une agglomération resta aux commandes de son appareil et fit le sacrifice de sa vie, évitant ainsi un drame épouvantable à la population du bourg. On ne sait pas pourquoi le mitrailleur Masterman était resté à bord. Le Maire Monsieur Francis Bedel rapidement organisa la recherche des aviateurs qui avaient dû sauter en parachute. Il organisa plusieurs groupes. Il fallait faire vite car les Allemands n’allaient pas tarder a arriver sur les lieux. Rapidement des Canadiens blessés furent retrouvés et protégés mais les allemands les firent prisonniers.

Un témoin raconte… Je suis parti avec un petit groupe à la périphérie du bourg à leur recherche. Nous devions être discrets car nous savions que l’occupant ne tarderait pas. Traversant un petit champ nous avons découvert le corps du Sergent Putman qui lui avait sauté tardivement et beaucoup trop bas. Son parachute ne s était pas ouvert, ce qui l’entraîna dans la mort. Il gisait, accroché dans un chêne dans les sangles de son parachute. Un peu plus tard les Allemands arrivèrent venant de Lanrelas. C’était un groupe de soldats affectés à la surveillance et à l’observation, dirigés par un officier du nom de Muller. Le lendemain matin s’offrait autour de nous un spectacle de désolation. Aux abords de la zone de chute, tout était disloqué. Parmi les débris de la carlingue apparaissait les restes des deux aviateurs. L’incendie avait été intense, tout était calciné. Quel sacrifice. Les arbres, tout autour étaient noirs. On retrouvaient des débris à plusieurs centaines de mètres de l’impact. Il fallut rendre un dernier hommage à ces trois aviateurs morts sur notre sol. Les obsèques devaient avoir lieu. Mais quand, car l’occupant seul maître des situations devait en décider, ne voulant pas que la population y assiste. Le Maire ne l’entendait pas de cette manière et bien décidé à organiser des funérailles à ces enfants venus d’Outre Atlantique pour notre LIBERTÉ.

 

Picture prepared for Wikipedia by Keith Edkins in April 2004.

Aircraft of the Fighting Powers Vol I

Ed: H J Cooper, O G Thetford and D A. Russell

Harborough Publishing Co, Leicester, England 1940.

 

Le jeudi 28 janvier 1943 vers 9 heures le Maire Monsieur Bedel fut informé par les allemands que les obsèques auraient lieu à 11 heures. Il avait devant lui deux heures pour faire prévenir le maximum de personnes, dans Éreac et dans les communes voisines. Ce matin là, à 11heures précises, c’est une foule innombrable qui se présenta sur la place avec des fleurs. La surprise fut totale pour l’occupant, qui lui, en avait décidé autrement. Un groupe de soldats allemands étaient sur place, ils avaient reçu l’ordre de rendre les honneurs militaires à ces malheureux Canadiens. Une salve fut tirée au cimetière lors de l’inhumation. Les trois cercueils furent recouverts des drapeaux Français et Alliés. Les Aviateurs survivants qui avaient été fait prisonniers et aux mains des allemands, furent autorisés à assister aux funérailles de leurs camarades . Ils furent envoyés dans un camp en Allemagne et ne furent libérés qu’a la fin de la guerre en 1945. Monsieur Bedel fut convoqué immédiatement à la Kommandantur à Saint Brieuc pour qu’il s’explique sur la venue d’une telle foule à l’enterrement. On craignait pour lui, mais heureusement, il ne lui arriva rien. Sur les croix de bois des trois CANADIENS, furent inscrits sur ordre du Maire ces inscriptions en Anglais REST THE LORD (repose prés du Seigneur) et LIVING FOR DUTY, DYING FOR GLORY (Vivre pour le devoir, mourir pour la gloire) ce qui irrita le commandement allemand de la région.

 

Les trois Aviateurs Canadiens reposent au cimetière communal d’Éreac ou leur mémoire est célébrée à chaque cérémonie de commémoration.

 

Je tiens à remercier Monsieur Geffray Maire d’Éreac, Monsieur Coquio ancien Maire, Monsieur Gueheneuc, ainsi que le personnel de la Mairie pour l’aimable accueil que l’on m’a réservé.

Jean Michel Martin, Association Bretonne du Souvenir Aérien. Le 27 avril 2009.

Lieu du crash du Wellington BJ714

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Cimetière communal d'Eréac
Photos Jean Michel Martin