Le 6 août 1944

Junker 188 F-1

(WNr. 280217)

Codé F6+GL

Aufklärungsgruppe 3.(F)/122

Insigne de la 3.(F)/122

GOCORSEUL. Côtes d'Armor. Nuit du 5 au 6 août 1944.

Rapport de la perte d'un bombardier Allemand Junker 88, au lieu dit ''La Favrais ".

  

Témoignages. Monsieur G. de Quévert.

 

Nous étions couchés, mais je ne dormais pas. Il était environ 23 heures. Soudain j’entendis un avion qui me semblait bas en altitude. Je me suis levé rapidement et suis allé devant la maison, dans notre cour. J’ai vu un avion en feu. J’ai alerté mes parents qui sont venus voir. La nuit était claire et la lune brillait. Nous voyions très bien l’incendie dans l’aile gauche. Il est passé lentement au dessus de la lisière d’un champ donnant dans le nord de notre habitation. Il perdait de l’altitude et se dirigeait sur Corseul. Nous étions inquiets de savoir ou il allait tomber car nous avions de la famille dans cette direction, espérant qu’il ne s’écraserait pas sur une maison occupée. Il a disparu, puis plus rien, même pas un bruit par la suite. Nous nous sommes recouchés. Ce n’est que le lendemain que nous avons appris qu’il était tombé au dessus des virages menant à Corseul. Un ami m’a rapporté qu’il avait vu un aviateur sauter en parachute de couleur blanche. Lui aussi précise un clair de lune et aucun nuage. Il ne sut pas ce qu’il était advenu de cet homme.

 

Témoignage de Monsieur B.

 

Mes parents exploitaient une ferme au village de "La Hougrais" en Corseul. Ce soir la, nous nous apprêtions à nous coucher. Je ne saurai dire l’heure mais il faisait nuit depuis un petit moment. Mon père entendit le bruit d’un avion qui semblait tourner autour de chez nous. C’était tout proche. Aussitôt, il sorti de la maison pour voir ce qui se passait. Qu’elle ne fût pas sa surprise de voir cet avion en feu venant dans notre direction. Il nous alerta aussitôt pour que nous puissions fuir le cas échéant ,ou au moins nous abriter dans un endroit qui n’était pas prévu à l’avance certes car nous ne pensions pas être un jour soumis à une telle situation.

Tout se passa très vite. Ce fût effrayant, un déluge de feu quand il se délesta de ses bombes incendiaires dans un champ situé à 500 mètres d’ici. Heureusement, il n’y avait personne dessous. De chez nous, nous sentions la chaleur. Cet incendie dura peu de temps. Poursuivant sa route, il perdit un moteur, celui qui était en feu, juste en bordure de la route qui va de Corseul à Quévert. Rapidement il s’écrasa dans un bruit terrible. Un incendie se déclara dans les restes de l’avion. Nous avons peu dormi cette nuit, impatients d’aller voir, mais en prenant garde aux allemands qui n’avaient pas quitté la région, mais qui n’allaient pas tarder à le faire car les troupes Américaines approchaient de Dinan. Nous nous rendîmes sur les lieux le lendemain matin. C’était distant de chez nous de 800 mètres. Il y avait beaucoup de monde déjà mais pas d’occupant. Le nez de l’avion dépassait au dessus du sommet de la vallée. Prés du ruisseau, gisait le corps du pilote et dans le pré tout proche celui d’un autre aviateur mort lui aussi. C’était de jeunes hommes. C’était triste de voir ces vies brisées, tant d’un côté comme de l’autre dans cette guerre. Les deux Allemands avaient été éjectés de leur poste de pilotage dans le choc violent avec le sol. Le surlendemain avec des camarades, nous sommes retournés sur les lieux. Les deux aviateurs étaient toujours dans la vallée. La carcasse ne brûlait plus. Au retour, en lisière de la vallée, nous sommes tombés nez à nez avec une dizaine d’allemands qui revenaient eux aussi semble t-il de cette vallée. Nous avons eus très peur. Ils étaient sales, leurs visages étaient fatigués, ils semblaient désemparés.

L’un d’entre eux parlant un peu notre langue nous demanda de faire en sorte d’enterrer les corps de leurs compatriotes. Nous avons répondu oui, disant que quelqu’un s’en occuperait, ce qui fut fait. Un des aviateurs qui avait sauté en parachute tomba juste dans la cour de la ferme du "Haut Becherel", située l’autre côté de la vallée près des ruines romaines. Il frappa à la porte de la maison d’habitation. Le fermier surpris en pleine nuit eut très peur. L’allemand lui demanda de le conduire chez le Maire de la commune. Ce qui fût fait aussitôt. C’était Monsieur de Pontbriand à l’époque qui occupait les fonctions. Il faut noter qu’un deuxième aviateur tomba à la "Ville Quematz" près de la route départementale Dinan-Plancoët et fût fait prisonnier par les résistants. Il fut conduit le lendemain après midi à la Mairie de Dinan. Le troisième homme qui avait aussi sauté en parachute s’évada pendant plusieurs jours, porté disparu dans un premier temps, il fût capturé par les américains. Un aviateur prisonnier confirma bien dans son récit de capture qu’ils avaient bien été trois à évacuer l’avion. Dans les mois qui suivirent cet événement, un agriculteur qui travaillait dans son champ prés du « Temple de Mars » (Ruines Romaines), de l’autre côté de la vallée retrouva un morceau de l’empennage de l’avion, ce qui explique bien la violence du choc à l’atterrissage. Le champ où étaient tombées les bombes offrait un spectacle de désolation. Le sol était brûlé sur une grande surface. Les pommiers n’étaient plus que des squelettes noircis. Tout était noir. Madame H apporte son témoignage. La carcasse de l’avion était éclatée et il y avait des morceaux partout sur plusieurs centaines de mètres aux alentours. Il y eut une foule importante à venir voir cet événement. Beaucoup emmenaient en souvenir des morceaux. Je me souviens d’une personne qui avait pris un morceau de tôle avec des lettres dessus. Je me souviens aussi qu’un aviateur était tombé proche de chez nous à la "Ville Quematz" et fût fait prisonnier. Les deux pilotes étaient tombés dans la vallée et gisaient morts. C’est cette même nuit qu’un autre bombardier Allemand fut abattu deux heures après sur Saint Michel de Plélan.

 

Un des aviateurs allemand tomba en parachute dans la cour de la ferme du "Haut Becherel"

 

Ils sont morts lors du choc au sol. Ils ont été retrouvés dans le fond de la vallée. Ils n'avaient pas pu quitter l'avion à temps. Les autres hommes furent faits prisonniers.

Site du crash

Photo JM

Cette perte aérienne allemande est à placer dans le contexte des événements qui se déroulaient dans la région. Nous sommes deux mois après le Débarquement de Normandie le 6 juin, les Américains et les Alliés progressent face à un ennemi quelque peu désemparé mais toujours efficace. Certains verrous ont sauté récemment et en dernier viens d'avoir lieu. La percée d'Avranches. Toute cette armada déferle vers l'ouest sous les ordres du général Patton et il est urgent pour les Allemands de connaître la situation chaque jour pour pouvoir essayer de réagir, mais il leur sera difficile de réaliser une contre-attaque car sur le terrain c'est la plus grande désorganisation dans la région.

 

GO

Photo carte de l'avancée américaine en Bretagne, éditions Heimdal  

 

GOGO

Capitaine Melvin Voorhees, place Duguesclin à Dinan et place du Marchix, se rendant à la mairie

Photo collection bibliothèque de Dinan

 

Dinan sera libéré le jour même dimanche 6 août 1944. Un détachement américain de quelques soldats, conduits par le capitaine Melvin Voorhees entra en ville en après midi sous l'ovation des habitants et fut conduit à l'Hôtel de ville ou il rencontra le Maire Monsieur Aubry. Le lundi 7 août à Dinan les Américains traversèrent la ville dans la joie d'une population qui avait retrouvé sa LIBERTÉ.

 

GO

Siège de l'opérateur radio du Junker 188, Musée REMEMBER 39-45 à Dinan. Autorisation photo M PASTUREL

Dossier historique constitué par Jean Michel Martin et Yves Jouan, ABSA 39-45

 

Côtes d'Armor. Nuit du 5 au 6 août 1944.

Rapport de la perte d'un bombardier Allemand Junker 188. Lors d'une reconnaissance photographique de nuit.

Le Leutnant Fritz Lauter et l'équipage du F6+GL de la 3ème escadrille de l'Aufklärungsgruppe 122, décollent de Paris-Buc près de Versailles à 23 heures 30, le 5 août 1944 pour effectuer une mission de reconnaissance de nuit afin de photographier les routes menant à Dinan, sur lesquelles les chars et les transports alliés étaient supposés progresser. Pour cette mission l'avion était équipé de deux caméras, installées dans à mi-fuselage proche de la soute à bombes. Il transportait dans sa soute à munitions, 10 bombes éclairantes servant à des prises de vues.

Après le décollage, le pilote à dirigé son avion vers l'objectif en ligne droite à une altitude de 100 à 150 mètres aidé par les appareils de bord nécessaires à l'évitement des obstacles pouvant se rencontrer sur son vol surtout à une altitude aussi basse, puis à commencé à monter plus en altitude à l'approche de l'objectif. Le ciel était peu nuageux cette nuit là avec un beau clair de lune. L'équipage avait annoncé la réalisation de sa mission aux environs de minuit quinze, il devait revenir sur Orly ou un autre aérodrome aux environs de Paris car l'aérodrome de Buc, d'où il était parti, s'avérait trop petit pour un atterrissage de nuit en toute sécurité. Quand soudainement, volant à 4000 mètres vers l'ouest, et à environ 10 minutes à l'est de Dinan, le bombardier à été attaqué par en dessous par un chasseur de nuit Anglais Mosquito. L'avion Allemand à pris feu immédiatement au niveau de l'aile et du moteur gauche. Les flammes se propageant rapidement le pilote ordonna de sauter en parachute immédiatement. L'opérateur radio et les deux mitrailleurs ont abandonné l'avion en peu de temps. Le Junker 188 s'est ensuite écrasé sur une butte au dessus de la vallée peu avant Corseul lorsque l'on vient de Dinan.  

 

 

 

Rapport des aviateurs Anglais équipage du Mosquito WIII/II, 604 Squadron RAF, nuit du 5 au 6 août 1944.

Équipage : Flight Lieutenant Jam Heddon. Observateur, Flying Officer Mac Ilvenny. Le Flight Lieutenant Heddon et son observateur on décollé de l'aérodrome de Picauville (Manche) à 23 heures 59 (Picauville, aérodrome construit rapidement par le Génie Américain au début de l'offensive Alliée) dénommé A.8.

Après plusieurs tests d'étalonnage des appareils de bord en vol, j'ai retrouvé la possibilité d'une cible dans un rayon ouest. Quelques minutes plus tard nous étions à 1500 mètres d'altitude lorsque mon navigateur a obtenu un contact passant de bâbord à tribord à une distance de 7 km et bien au dessus de nous. Je suis monté doucement vers cette cible en essayant de ne pas nous faire remarquer par l'équipage. La cible à tourné lentement sur sa gauche, pour vernir se stabiliser à 3000 mètres. A ce moment j'ai obtenu un contact visuel avec cette cible, me plaçant en dessous d'elle, restant ainsi à l'abri de la lune. J'ai identifié cet avion comme étant un Junker 188. Mon navigateur, à l'aide de jumelles à vision nocturne, a confirmé l'identification. Je suis remonté vers l'est et ai tiré une courte rafale, ce qui a entraîné une mise à feu du moteur gauche quelque chose a quitté l'avion à ce moment. Ma seconde rafale a touché l'extrémité de l'aile gauche. L'avion ennemi a tourné en vrille et ensuite est tombé dans une terrible explosion que nous avons pu observer. Préalablement il s'était séparé de ses bombes éclairantes. Je suis redescendu en piqué et ai donné plusieurs caps à mon observateur. Nous avons chassé une autre cible retrouvée mais malgré que nous ayons vu une lueur géante au sol et que nous revendiquions la perte d'un Junker 88 rien n'est venu confirmer une seconde victoire. L'explosion a-t-elle été due au largage de bombes pour pouvoir fuir rapidement. Au niveau de nos recherches ABSA 39-45, rien n'est retrouvé en ce sens pour cette date.

 

Ossuaire de Huisnes sur Mer (Manche)

Plaque des soldats et des aviateurs inhumés comme inconnus, le Leutnant Fritz Lauter et l'Oberfeldwebel Hans Müller n'ont put être identifiés.

Dossier historique constitué par Jean Michel Martin et Yves Jouan, ABSA 39-45

 Crédit photo : Insigne 3.(F)/122

Source documents : Rapport ADI(K) 479/44.

Combat Reports RAF Reference : AIR/50/168

Référence du type de l'avion Ju 188 F-1 : www.forums.luftwaffedata.co.uk - Andy Mitchell & Remi Traconelli