Le 6 août 1944

St Michel de Plélan

Do 217 M-1

Codé 6N + ED

(WNr. )

Contexte Historique

 

Près d'un mois et demi après le débarquement du 6 juin 1944, les Américains piétinent dans le bocage normand avec des pertes importantes pour un minimum de gains. Des centaines de milliers d'hommes commencent à saturer l'espace de la tête de pont.

 

L'opération Cobra est le nom de code de l'offensive américaine menée par le Général Omar Bradley le 25 juillet 1944 dans le Cotentin pendant la Bataille de Normandie afin de s'ouvrir la route de la Bretagne, et d'enfoncer les lignes de défense allemandes. La réussite de cette opération, par la percée d'Avranches puis le contournement des lignes allemandes, en fait le tournant majeur de l'offensive alliée en Normandie.

Le 31 juillet la 4ème division blindée américaine du Général Wood réussit à prendre intact le pont de Pontaubault, sur la Sélune, voie de passage du plus haut intérêt stratégique vers la Bretagne.

 

Dans la nuit du 31 juillet au 1er août, la 3ème Armée US du Général Patton pénètre en Bretagne via Pontaubault et Pontorson et commence la Libération de la Bretagne suivant 3 axes principaux :

La Task Force A du Général Earnest se dirige vers Morlaix via Dinan. La 6ème Division Blindée du Général Grow se dirige vers Brest via Loudéac. La 4ème Division Blindée du Général Wood se dirige vers Lorient via Rennes et Bain-de-Bretagne. L'armée Allemande se replie dans les forteresses (Festungs) de Saint-Malo, Brest, Lorient, Saint Nazaire. Deux avions Allemands sont abattus par l'aviation de chasse Alliée dans la nuit du 5 au 6 août 1944 : Un avion de reconnaissance "Junker 188" à Corseul. Un avion-bombardier "Dornier 217" à St Michel de PlélanLe bombardier, "Dornier 217" codé 6N+ED, tombé à Saint Michel de Plélan

 

Le Dornier :

 

Le 5 août 1944 vers 23h00, 8 à 10 avions du III/K.G. 100(1), partent de Toulouse-Blagnac pour bombarder le pont de Pontaubault. Chaque avion transporte une bombe. Deux avions du groupe d'état-major et le reste des 3 escadrilles, décollent à 2 mn d'intervalle, le 6N+ED est le 4ème à s'envoler. Le plan de vol est de traverser les côtes de la Bretagne à l'ouest d'Avranches pour effectuer une attaque dans le sens nord-sud. Pendant l'approche de l'objectif à 1300/1400 mètres d'altitude, le mitrailleur du Dornier aperçoit un chasseur de nuit bimoteur volant derrière et en dessous. Le pilote effectue une manœuvre de fuite, sous la forme d'un vol plané de gauche et à droite, mais 2 à 3 minutes plus tard le chasseur de nuit réapparait et touche au but dès ses premiers tirs. L'aile et le moteur gauche prennent feu et la bombe devenant brulante, l'équipage reçoit l'ordre de sauter en parachute.

(1) : III/K.G. 100 : III/K Kampfgeschwader 100 : 3ème Groupe de la 100ème Escadre de bombardement.

 

Le Mosquito :

 

Le Mosquito XIII Mk.VIII du Flight/Sergeant Mac Lean, Pilote, et Flight/Officer B.C. Grant, Navigateur, décolle à 23h35 le 5 juin 1944 de Colerne en Angleterre. Appartenant à la 488ème Escadrille de la Royal New Zealand Air Force(2) il va effectuer une patrouille dans le golfe de St Malo.

Le Flight/Sergeant Mac Lean déclare :

"Mon navigateur indique qu'il a un contact radar. Je m'approche et identifie la cible comme étant un Do 217. Mon navigateur confirme à nouveau en utilisant des lunettes de vision nocturne. Je me place à gauche légèrement en dessous et ouvre le feu avec une courte rafale. J'observe des étincelles sur le moteur gauche et le fuselage à partir duquel je peux voir de petites explosions. En même temps que mon ouverture du feu l'avion ennemi décroche à gauche et riposte par un tir qui ne touche pas mon avion. L'avion ennemi effectue une violente manœuvre de fuite et je le suis, mais je n'ai pas l'occasion de me positionner pour ouvrir le feu à nouveau. L'avion ennemi continue par une très violente manœuvre de fuite vers le bas et durant laquelle je le dépasse et perds le contact visuel. Le contact visuel est également perdu dans la chute au sol. Alors que l'avion ennemi plonge dans une action de fuite des flammèches semblent sortir de son moteur gauche."

 

(2) : Cette unité de la Nouvelle Zélande volait sous commandement de la Royal Air Force Anglaise.

Nota : Il existe peut-être un film de l'attaque dans les archives Anglaises puisque sur le rapport il est noté "Caméra cinématographique utilisée automatiquement.

 

Témoignages :

Les informations, ci-dessous, sont issues des témoignages de Mesdames Anne-Marie Jouan, Angèle Grosset, Messieurs Yves Allain et Yves Lefort de Saint Michel de Plélan. Dans la nuit du samedi 5 au dimanche 6 août 1944 vers 2 heures du matin un avion Allemand est attaqué et mitraillé, au-dessus du village de "La Vieuxville" sur la commune de "Bourseul".

L'avion en feu rase le clocher de l'église et s'écrase dans une lande de saules appelée "sous le bois " à environ 600 mètres à l'est du bourg. La population entend une fusillade, ce sont les munitions de l'avion qui explosent. Le dimanche matin, dès le lever du jour, la première sur les lieux du crash est Madame Mesfray dite "La Giembe" qui habite à l'Hôtel Havet. Après la messe la population va voir l'avion tombé, dans un cratère creusé par la chute et l'explosion de l'avion, et le corps d'un aviateur carbonisé qui est allongé sur un tas de fagots qui a pris feu. Un autre aviateur qui a sauté en parachute se présente le dimanche matin au Bourg de St Michel et a demande à Jean Martin (Père de Angèle Grosset) de le conduire sur le lieu du crash. Ensuite il se rend à l'épicerie, chez Joseph et Denise Bonenfant, pour téléphoner. Joseph Bonenfant va chercher Mr Lenhart(3) qui habite le bourg et parle couramment allemand. Mr Lenhart et des menbres de la résistance locale veulent le tuer dans l'épicerie, mais Joseph Bonenfant s'y oppose. L'aviateur Allemand n'ayant pu contacter les autorités allemandes à Dinan part vers Jugon, avec un vélo réquisitionné. Le menuisier Auguste LE Gagnoux et son apprenti Yves Allain font un cercueil en peuplier et vont chercher l'aviateur allemand à l'aide du cheval et de la charrette de Joseph Hue, cultivateur à l'Hôtel Havet. Ils le mettent en bière puis l'enterrent dans le cimetière communal sans cérémonie et sans inscription au registre des décès de l'état-civil. Quelques semaines ou mois plus tard le corps est exhumé en présence de civils et militaires alliés. Il est enterré au cimetière allemand de Marigny (Manche).

 

(3) : Mr Lenhart d'origine Tchèque, était réfugié à St Michel de Plélan avant la guerre. Il a travaillé dans l'entreprise qui a effectué l'électrification du bourg en 37-38. Il s'était fait embaucher comme civil, à l'organisation Todt, et travaillait à l'édification du Mur de l'Atlantique vers Dinard-Pleurtuit où il résidait la semaine.

L'équipage du Dornier. Sur les quatre hommes d'équipage , trois sautent en parachute et un est tué dans le crash de l'avion.

Equipage
Rôle
Commentaires
Alfred Schlecht

Leutnant (Sous-Lieutenant)

Pilote

Blessé et fait prisonnier par la résistance. Remis à l’armée Américaine et hospitalisé. Prisonnier de Guerre.

Ewald Otto Unteroffizier (Sergent)
Observateur

Revenu à St Michel de Plélan le matin du crash, il est blessé et fait prisonnier par la résistance. Remis à l’armée Américaine.

Prisonnier de guerre

Günther Eilf

Feldwebel (Adjudant)

Radio

Mort dans le crash de l’avion le 6 août 1944. Né le 01.09.1917 à Arys. Déclaré mort le 15.08.1944. Enterré au cimetière Allemand de Marigny (Manche). (Bloc : 4, Rangée : 50, Tombe : 1931). Mort au combat.

Friedrich Hoefelmeier

Unteroffizier (Sergent)

Mitrailleur

Fait prisonnier par la résistance 11heures plus tard et retenu pendant 8 jours, il est remis à l’armée Américaine. Prisonnier de guerre.

 

La progression américaine en Bretagne

 

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Source photo : La Bretagne en guerre 1939-1945 (1994) Editions HEIMDAL

 

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Lieu du combat
Lieu du crash

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Lieu du crash. L'avion est tombé près de l'angle formé par les 2 clôtures.

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Photo du poignard du Feldwebel Günther Eilf

Trouvé par Yves Lefort en cultivant son champ

Source Photo : Yves Jouan

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Un Dornier 217 et un Mosquito

Merci à Yves Jouan, pour le récit, témoignages, carte.

Et à Philippe Dufrasne pour avoir résolu ce crash.

Source : Rapport ADIK n° : 471/1944. Air Ministry: Combat Reports, Second World War - AIR 50/161.