Marcel Bouguen est né le 14 avril 1920, au Faou (Finistère). Son père prénommé Guillaume, avait servi dans la Marine pendant de nombreuses années puis était allé travailler à Paris dans une banque, la Trésorerie Générale. Il prendra sa retraite en tant qu'officier marinier (1er Maître), Chevalier de la Légion d'Honneur. Il était très lié au célèbre aviateur Joseph-Marie Le Brix qui habitait à Baden (Morbihan) et qui trouva la mort le 12 septembre 1931 en Russie, lors d'une tentative de raid Paris-Tokyo avec Marcel Doret. Après avoir quitté la capitale, la famille Bouguen vient habiter l'Isle d'Arz dans le golfe du Morbihan. En 1931, Marcel Bouguen est envoyé faire ses études au collège Saint-François-Xavier de Vannes. En 1933, il intègre le Petit Séminaire de Sainte-Anne-d'Auray. Marcel, bien que réservé est d'un caractère énergique et adore la lecture. En 1938, il part habiter chez sa grand-mère à Plabennec, commune située près de l'aérodrome de Guipavas. Le jeune Marcel rêve à la vue des avions et décide dès lors de devenir pilote. Il poursuit ses études au collège Saint-François de Lesneven, où il passe la première partie de son Baccalauréat en 1939. Le 15 janvier 1940, il s'engage pour la durée de la guerre au titre du Bataillon de l' Air n° 109 de Tours, en qualité d'élève pilote. Il est admis à l'Ecole de pilotage n° 26 à Quimper-Pluguffan. Après la signature de l'armistice, l'école se replie à Morlaix, sous le commandement du lieutenant Pinot et de son adjoint le sous-lieutenant Berthier. Le 15 juin, devant l'avancée allemande, tout le personnel de l'école se rend à Douarnenez. Le patron d'un langoustier "Le Trébouliste" accepte de transporter les élèves pilotes vers un port anglais. On embarque cinq jours de vivres et le moins possible de bagages, tandis que les moniteurs ont quitté Pluguffan à bord de leurs Luciole pour rejoindre le midi de la France. Le 19 juin à 23h15, c'est l'embarquement à bord du "Trébouliste". Avant le départ, le sous-lieutenant Berthier s'adresse à ses élèves: "Mes petits gars, on nous demande de désarmer, mais à mon avis tout vaut mieux que de tomber entre les mains des boches ". Le lendemain vers midi, une vedette anglaise leur demande de rallier Falmouth qui se trouve pourtant à belle distance. Un vapeur, le "Lady Estelle" les prend en remorque. Dès son arrivée en Angleterre, le caporal Marcel Bouguen signe son engagement volontaire dans les FAFL (matricule n° 30.155). Il prend le pseudonyme de Monfort Marcel, en hommage au Maître-Pilote Marcel Monfort de Guipavas, décédé en 1938. Le 27 juin 1940, il est dirigé sur la base de Saint-Athan. Le 14 juillet, il participe à la revue de la Fête Nationale à Londres. En novembre, il est dirigé sur la base d'Odiham pour suivre une instruction complémentaire. A l'issue de son stage à la 5 Service Flying Training School de Ternhill, le 30 septembre 1941, il obtient son brevet de pilote militaire anglais. Il est ensuite affecté à la 59 Operational Training Unit de Crosby-on-Eden, afin de terminer son entraînement. Désormais il peut prétendre à une place dans une unité combattante. Le 19 novembre 1941, il rejoint le groupe de chasse n° 2 " Ile-de-France " (340 Squadron de la RAF). Il est affecté au Flight A sous les ordres du commandant de Scitivaux. Le 16 juin 1942, au cours d'une mission où il est l'équipier de René Mouchotte, il endommage un Fw 190 au large de Cherbourg, mais cette victoire n'est pas homologuée. Deux jours après, une première citation est attribuée au sergent Bouguen pour sa conduite lors d'un combat contre des chars allemands. Le 19 août, il participe avec une énergie farouche aux opérations du débarquement de Dieppe. Son Spitfire est touché sérieusement, mais il parvient malgré cela à regagner sa base. Il relate ces opérations à la BBC et sa voix fut reconnue par un de ses anciens camarades de Plabennec qui l'avait très bien connu. Il remporte sa première victoire aérienne officielle le 1er décembre 1942, en détruisant un Fw 190 au-dessus de Saint-Omer. Le 24 janvier 1943, il est affecté au groupe de chasse n° 1 "Alsace" qui se reforme à Turnhouse sur Spitfire en tant que 341 Squadron. Il intègre la 2ème escadrille "Strasbourg" commandée par le capitaine Michel Boudier. A l'"Alsace", il retrouve le commandant René Mouchotte qui était son chef de groupe quelques mois plus tôt. Celui-ci estimait beaucoup Marcel Bouguen. Dans les célèbres "Carnets" de René Mouchotte, on trouve les lignes élogieuses suivantes: " Je revois avec joie le petit Bouguen, à qui au début du 340, j'avais multiplié mes conseils; je sentais dans le débutant un pilote ardent dont les qualités ne demandaient qu'à se developper. Je l'ai particulièrement suivi et soutenu; la majorité de ses missions offensives et de ses combats, il les a faits derrière moi. Aujourd'hui le petit sergent Bouguen est devenu un sous-lieutenant très fier de ses galons, qu'il a bien mérités. ". En effet, Marcel a été promu sous-lieutenant le 15 mars 1943 . Le 17 mai 1943, au cours d'une mission au-dessus de la Normandie, il rencontre un groupe d'avions ennemis. Fonçant dans le tas, il abat un Fw 190 au large de Caen, alors que les adversaires étaient supérieurs en nombre. Promu lieutenant, il obtient sa troisième victoire le 22 août, toujours sur un Fw 190, au-dessus de Beaumont-le-Roger. Marcel Bouguen est devenu un chasseur redoutable. Il confirme sa réputation les 2 et 22 septembre 1943, en détruisant deux autres Fw 190, au-dessus de Mazingarbe et de Saint-Valéry-sur-Somme. Il est nommé capitaine à titre fictif le 1er janvier 1944. Doué des plus belles qualités militaires, il est proposé pour prendre le commandement d'une escadrille du groupe "Alsace" au début de l'année 1944. Détaché à la Central Gunnery School, le capitaine Bouguen trouve la mort le 9 mars 1944. Alors qu'il se prépare à effectuer un exercice de bombardement avec son Spitfire VB, il est victime d'une défaillance du système de protection. Sa bombe explose sous les plans de son avion. Son corps retrouvé en mer au sud-est de Coswick est ramené en Angleterre. Le certificat de décès a été délivré par R.W.Bell. Le lieu de décès mentionnait le sous-district de Berwick, comté de Northumberland. Marcel Bouguen a été inhumé à Harrogate, le 13 mars 1944. Dès l'annonce de sa mort, sa famille et ses amis de Plabennec firent célébrer une messe, le 16 octobre 1944. Au moment de sa disparition, le capitaine Marcel Bouguen avait à son palmarès cinq victoires homologuées et trois probables. Titulaire de la Croix de Guerre 39-45 avec cinq palmes, la Médaille de la Résistance avec rosette, et la Distinguished Flying Cross. Il a recu six citations, dont cinq à l'ordre de l'Armée aérienne. Une septième citation lui sera décernée à titre posthume. Le texte de sa dernière citation mettait en valeur les qualités de ce jeune homme: "Pilote de grande classe, plein d'allant et d'audace qui a effectué de nombreuses missions. Animé d'un patriotisme ardent et d'une haute conception du devoir".
Le 24 septembre 1946, le commandant Michel Boudier adresse une lettre à la mère de Marcel Bouguen, dans laquelle il indique que Marcel était son meilleur ami et son meilleur pilote et qu'il avait fait une guerre splendide. Et il terminait sa lettre par ces mots: "Vous pouvez être fière d'avoir un fils tel que lui ".
Le 20 janvier 1949, eurent lieu les obsèques de Marcel Bouguen dans l'église cathédrale de Vannes. Il fut inhumé au cimetière de Boismoreau à Vannes, dans le caveau de famille. Si vous passez un jour par Plabennec, vous ne pourrez manquer d'aperçevoir peu après l'église, au fond d'une place entourée d'arbres, un grand bâtiment dénommé "Salle des Sports Marcel Bouguen". La rue elle-même porte le nom du capitaine Marcel Bouguen "Mort pour la France " en service aérien commandé, le 9 mars 1944. Souvenez vous alors de ce capitaine, fauché en pleine jeunesse, et de ces paroles qu'il avait prononcées à un de ses camarades en 1940, en s'engageant dans l'armée de l'Air: "L'aviation me fait me rapprocher du ciel et s'il m'arrivait de mourir, je serai plus près du Paradis ! ". C'était signé par Marcel Bouguen, lorsqu'il avait 20 ans.
Croix de Guerre 39-45 avec cinq palmes Médaille de la Résistance avec rosette Distinguished Flying Cross
Avec l'aimable autorisation de publication pour l'ABSA 39-45 - Biographie copyright Yves Donjon |
Documents : Archives Emile MORIN